Je préfère casser le suspens tout de suite : Est-il difficile de ne pas faire d’effort ?
La réponse est OUI !
Ce post est publié à l’occasion de ma première vidéo. Il reprend en grande partie du contenu que vous pouvez y trouver en la regardant ci-dessous.
Désolé pour les paresseux, mais un vrai paresseux, celui qui s’y met à fond, et bien, il travaille lui-aussi à alimenter sa paresse. Et cela, pour lui aussi, demande pas mal d’effort !
Et voici pourquoi :
A quoi pense-t-on quand on dit “sans effort” ?
Alors cela peut-être : des personnes qui font des choses avec une aisance et un naturel qui ne rendent compte, ni de la difficulté, ni de l’effort à fournir.
Quelles sont les conséquences pour soi : des actions, des pensées que l’on accomplit sans s’en rendre compte, parce que c’est facile, par habitude, parce qu’on sait les faire…
Et pour les autres : c’est dans la perception de la difficulté, par rapport à nos propres aptitudes, que l’on se fait son opinion.
L’effort valorisé
Dans notre culture judéo-chrétienne, l’effort, ou, ce qui est accompli dans la souffrance, est particulièrement valorisé.
Mais, qu’entend-on par effort, ce peut-être :
- l’activité d’un être conscient qui emploie ses forces pour vaincre une résistance.
ou - la concentration des forces physiques ou morales afin d’accéder à un but.
On apprécie ainsi l’effort perçu, l’effort dont on se représente la difficulté.
On glorifie surtout ce qui nous semble difficile ou ce qui nous semble hors de notre portée. Ce peut-être aussi l’habilité, plus rarement la créativité ou la capacité à transmettre un message, une émotion. Ou bien encore le temps passé pour réaliser un travail.
Prenons un exemple : un musicien, pianiste ou guitariste. La différence entre un musicien et un grand musicien, ce n’est pas la seule virtuosité, mais la capacité à faire vivre l’oeuvre, à transmettre des émotions, à donner du relief aux sonorités…à mettre en résonance le public, … à faire justement oublier la technique. Cette technique qui nous semble précisément être la plus grande difficulté à atteindre.
Ce qui est facile… ne demande pas d’effort
Nous avons tous en tête des personnes talentueuses que ce soit dans un domaine sportif, artistique, intellectuel.
Par exemple, à titre personnel je pense en ce moment à
- un chef qui émince des légumes au couteau à la vitesse de l’éclair
- un surfeur qui s’enfonce dans une énorme vague et ressort au bout du rouleau
- un musicien, conférencier, humoriste, homme politique qui capte l’attention de milliers de personnes
- un violoniste : essayez de faire votre première note sur un violon pour vous rendre compte
A l’inverse :
Sans aller dans la performance, pensons à notre langue maternelle. Nous la parlons sans nous en rendre compte. On parle sans faire d’effort. Mais essayons de le faire dans une langue étrangère. Ah, ce n’est pas tout à fait la même chose.
Et plus on vieillit, plus une langue est difficile à apprendre. Mais plus on la pratique, plus c’est facile.
En plus, plus on maîtrise des langues différentes, plus il est facile d’en apprendre une nouvelle.
Je ne rentrerai pas dans les détails neuro-biologiques, ou psycho-cognitif ici. Mais cela s’explique.
Ce qui ne demande pas d’effort… n’est pas facile
L’être humain, d’une manière générale, ne sait absolument rien faire quand il naît (à part manger et respirer). Toute compétence, connaissance, méthode, aptitude… tout nécessite essai, mémorisation, échec, expérimentation, oubli, échec, essai, répétition, du temps, du temps…
Même se vautrer dans un canapé toute la journée, implique, un certain nombre d’aptitudes. Certes peu valorisées socialement. Mais elles existent.
Le problème risque cependant de rapidement arriver. Comment sortir de son canapé ? Et sans effort ?
D’où cette déduction : ce n’est la complexité inhérente à une chose qui nécessite des efforts, c’est le développement de l’aptitude.
Donc oui, il est difficile de ne pas faire d’effort.
Résumons. Toute aptitude, chez l’homme, nécessite un apprentissage, qui peut lui nécessiter, un effort, dans le sens de concentrer ses aptitudes existantes dans cet apprentissage. Plus l’apprentissage sera complet, moins l’exercice de cet apprentissage nécessitera d’effort.
Si l’apprentissage peut nécessiter un effort, tout dépend bien sûr de l’état initial de l’apprentissage. Et c’est là l’effet vertueux. Plus je sais, plus c’est facile. Nous ne sommes pas tous égaux, même si certains ont plus de facilités que d’autres. Pour faire le premier pas, il faudra mobiliser des ressources, se concentrer, faire face à l’inconnu, pour développer ses aptitudes.
Alors je finirai par l’icône absolue, le champion du pfff, du “paresseux”, du “sans effort” : Gaston Lagaffe. Et pour bien comprendre tout son géni, il faut regarder entre les bulles.
Regardez toute les ressources techniques, l’ingéniosité, qu’il met en oeuvre pour ne rien faire ? Des machines au premier abord absurdes, qui parfois touchent au fantastique, simplement pour ne pas faire d’effort.
Pour s’en rendre compte, je vous renvoie à l’entrée wikipédia qui se trouve là.
Généralement, le cerveau développe une appréhension, et par réflexe de conservation, mésestime les efforts à fournir. Dans le cas de Gaston, les efforts gigantesques sont motivés par un idéal : le bien-être des autres et le sien, avec la promesse de fournir le moins d’effort possible, mais le chemin pour l’atteindre, lui, n’est pas pris compte.
L’effort qu’il redoute, il le pratique pour l’éviter. Et ainsi, mine de rien, il change le statut de l’effort. Il ne l’associe plus à la souffrance. Il la transfigure parce qu’il se fixe sur le développement d’une nouvelle compétence, aptitude, objet qu’il associe à un plaisir.
Donc en conclusion :
- Faire quelque chose sans effort demande une compétence, une aptitude
- Et pour acquérir une aptitude ou une compétence, il faut vaincre des résistances, aller à contre courant, concentrer ses forces physiques et mentales, entraîner sa mémoire procédurale…
- La difficulté dépend juste de ce que l’on pense d’elle. Et oui, et j’aurai l’occasion d’y revenir, le monde n’est rien de plus que ce qu’on pense qu’il est.
- Donc pour ne pas faire d’effort, il faut changer le statut de l’effort, et acquérir les premières aptitudes, compétences.
Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas.
Lao Tseu
Quelques trucs pour acquérir des aptitudes en dépassant la notion d’effort
- se créer des rites, des habitudes : pas le temps pour le doute.
- Se rendre compte de ses capacités pour relativiser les efforts à fournir, qui n’est pas si grand que ça en fait
- faire des petits pas réguliers : la sommes de petites actions font de grandes oeuvres.
- Exercice physique : atteindre l’état où le corps crée des endomorphines (cas des sportifs de très bon niveau
- …
Pour aller plus loin : voir la vidéos sur le premier facteur de bonheur sur terre, et comprendre le mécanisme du don et son rôle dans la structuration de la société.